Nous avons tous connu ou été confronté à un moment ou un autre de notre existence à des jeux divers et variés.
Et plus particulièrement à des jeux de cartes, comme le légendaire paquet de 52 cartes à jouer de papi et mamie ou alors aux cartons retrouvés dans le grenier plein de cartes Magic amassé durant la puberté de votre grand frère et peut-être plus récemment à la collectionnite aigue pour les cartes Pokémon du jeune cousin ayant trop regardé de vidéo sur YouTube…

Ça tombe bien, nous sommes sur YouTube ! et un cours d’histoire sur les origines des cartes ne ferait pas de mal à ce cousin dépassé par les événements entourant ses petits bouts de cartons si simples à fabriquer et pourtant si convoités !

Et parce que vous savez que le fil rouge de nos émissions est l’histoire de la ville de Lyon, vous allez voir que je n’ai pas choisi ce sujet au hasard…

A l’origine donc, pas de Pokémon, de sorciers aux charisme ravageur ou de pharaon au pouvoir magique sur les cartes à jouer.
Les cartes à collectionner comme nous les connaissons n’existaient pas, donc commençons pas le commencement !

Les plus anciennes cartes à jouer connues sont d'origine chinoise et apparurent durant la dynastie Tang entre 618 et 907 de notre ère, c’est-à-dire au moment où le format des livres passe du rouleau à la feuille.
Elles semblent avoir été développées à partir des anciens dés en provenance d'Inde et en liaison avec des pratiques divinatoires.
La plus ancienne carte, datée d’environ 1400 ans, a été trouvée par Albert von Le Coq à Tourfan en 1905 dans la province chinoise du Xinjiang.
Ces cartes sont parmi les premiers exemples d’estampes gravées et réalisées sur des pièces de bois, technique appelée xylographie et apparue à la fin de dynastie des Tang.

Joseph Needham, un éminent biochimiste et sinologue britannique ayant acquis une renommée mondiale en menant des recherches sur l'histoire des sciences et des techniques dans la civilisation chinoise estime, à la vue des différentes sources, que les cartes à jouer faites de plusieurs couches de papiers remontent au moins au IXème siècle.
Par ailleurs, ces cartes en papier évolueront au XIème siècle et donneront naissance aux dominos.

Les cartes chinoises correspondent à trois types de jeux : les cartes domino, les cartes monétaires, et les cartes d'échecs, qui reproduisent les pièces du xiangqi, un jeu d’échecs chinois.

Les cartes monétaires comprenaient un nombre variable de séries numériques, et étaient utilisés par différents jeux chinois :
- Le ya-pai, un jeu de 32 cartes ou le Ma-diao, un jeu de 40 cartes

C’est bien beau tout ce que tu nous racontes, mais là nous sommes toujours Chine, donc comment les « cartes » sont-elles arrivé chez nous et quand ?

Il est possible que les précurseurs directs des cartes européennes aient atteint l'Europe en passant d’abord par le moyen orient à la fin du XIVème siècle par l'intermédiaire des Mamelouks d'Égypte, il s’agissait d’une espèce de milice formée d'esclaves avec des gens de tout horizon, ce qui expliquerait leurs arrivé au moyen orient.
Les cartes en question seraient arrivées sous une forme très proche de celle connue aujourd'hui.

Un ensemble assez bien conservé de 47 cartes Mamelouk a été découvert par Leo Mayer au palais de Topkapi à Istanbul en 1938.
Ce jeu n'était pas plus ancien que son homologue chinois, mais il a permis d'identifier des fragments de jeux datés du XIIème ou du XIIIème siècle.

Par déduction, ce jeu devait comprendre au moins 5 couleurs, 4 honneurs et 10 cartes à points par couleur, et peut être un joker pour un total de 70 cartes environ.

Les honneurs portaient des noms qui nous parlent plus ou moins, à savoir le Roi, Vice-Roi, Second et Assistant.
Un peu à l’image de notre Roi, dame, Valet et As.
Ces cartes était également enrichi de motifs géométriques abstraits, sans forcément représenter des individus mais leur dénomination était cependant inscrite sur les cartes

Les cartes à jouer sont donc apparues en Europe à la même période par l'intermédiaire des Arabes ou par les échanges marchands avec les Mongols grâce à la Route de la soie, deux hypothèses retenues par Joseph Needham ou par Thomas Allsen, un professeur d’histoire.
Les mêmes historiens suggèrent que les cartes à jouer aient pu stimuler en Europe le développement de la xylographie, et en conséquence des autres techniques d'imprimerie, ceci paraît toutefois improbable puisque par exemple, si la datation du bois Protat est exacte, il s’agit du nom donné à un fragment de bois, gravé sur ses deux faces, datation remise en question aujourd’hui, elle précèderait largement l'apparition des cartes à jouer en Europe avec des travaux de qualité dans des zones géographiquement éloignées des régions où les cartes sont apparues pour la première fois.

Quelques décennies plus tard, le jeu de tarot apparaît dans les années 1440 dans le nord de l’Italie.
Très tôt sa structure ressemble à celle que nous connaissons aujourd’hui : quatre couleurs composées de dix cartes numérales de l'as au dix, quatre figures (valet, cavalier, reine et roi) ; à ces quatre séries est ajoutée une cinquième série de cartes (les triomphes qui seront plus tard appelés comme atouts) de vingt-deux cartes.

Donc résumons, les cartes auraient voyagé depuis la Chine vers le moyen orient puis seraient passer en Italie, qui dominait le bassin méditerranéen pour finalement arriver en France.

Soit, mais quid de la fabrication sur nos terres Françaises ?

L'énorme demande pour ces nouveaux types de jeux va pouvoir être satisfaite grâce à la gravure sur bois, un procédé innovant qui permet la multiplication mécanique des images.

Pour le coup ça tombe plutôt bien car nous avons la chance d’être à Lyon, ancienne capitale de l’imprimerie, pourquoi ne pas aller jeter un œil au musée dédié à cette art ? Allez habille toi et sors de la !

il a raison papy filou, allons-y !

Nous voici au musée de l’imprimerie et de la communication graphique de Lyon qui a la gentillesse de nous accueillir.

Si l’histoire de l’imprimerie et de ses techniques vous intéresse, nous ne pouvons que vous inviter à venir y faire un tour. Vous pourrez comprendre l’évolution et les techniques utilisées au bon développement de cet art qui jouera un rôle important dans le milieu du textile et de la librairie.

Bon, vous vous doutez bien que je ne suis pas ici par hasard, revenons donc au Lyon du XVème siècle.
La ville est connue pour la qualité de ses impressions sur étoffes et on utilise déjà comme mode de fabrication la gravure de figures sur plaque de bois faisant office de tampon.
Après encrage, les plaques impriment leurs motifs par pression sur le papier.
Puis le contre-collage de quatre feuilles de papier rigidifie le tout pour lui donner une texture cartonnée, d'où le nom de cartes.
Elles sont alors peintes à la main, puis découpées avant d'être recouvertes de savon, et enfin passées au lissoir afin de faciliter et optimiser leurs bonnes manipulations en jeu.

En 1614, treize maîtres cartiers lyonnais rédigent les statuts de la profession, en l’occurrence, les exigences de qualité et la protection de la propriété intellectuelle du métier.
Cela implique qu’ils sont dans l’obligation de faire figurer leur marque de fabrique sur la carte du valet de trèfle, tout comme les imprimeurs le font avec leur sceau : une manière de se faire connaître et de se bâtir une solide réputation, y compris à l’étranger.

Lyon, déjà considérée comme la capitale de l’imprimerie européenne, devient dès le XVIe siècle le plus grand centre d’exportation de cartes à jouer françaises, fournissant de grandes puissances comme l’Italie et l’Espagne.
Le commerce des cartes à jouer apparaît ainsi comme un des secteurs clés de l’économie lyonnaise, rapportant près de 200 000 écus par an.

Les cartiers de Lyon présentent leurs cartes avec des caractéristiques propres : Les rois portent tous un sceptre à fleur de Lys, le roi de cœur tient un perroquet, le roi de trèfle un globe surmonté d'une croix, la dame de carreau une fleur de tournesol, le valet de carreau une hallebarde etc...

En 1704, le père jésuite François Ménestrier enseignant au collège de la Trinité à Lyon – a croire que l’histoire du monde est liée systématiquement à cette ville - considère que le jeu de cartes représente un état politique composé de quatre corps : les ecclésiastiques, gens de cœur ; la noblesse militaire et ses armes, les piques ; les bourgeois aux maisons pavées comme des carreaux et les trèfles revenant tout naturellement aux paysans.
Louis XIV en profite, aussitôt, pour lever un impôt sur chaque jeu...

Pendant la Révolution française, la carte devient un véritable tract politique : le 22 octobre 1793, la Convention interdit les signes de royauté et de féodalité. Le bonnet phrygien dissimule la couronne et un soleil cache la fleur de lys.
Puis des jeux furent imprimés remplaçant les rois par des génies, les dames par des libertés et les valets par des égalités.

En 1858, Baptiste-Paul Grimaud, un fabricant de cartes parisien, introduit en France les coins arrondis, pour éviter que les cartes ne s'abîment.
Un procédé qui est d’ailleurs toujours d’actualité !

Et autres Anecdote intéressante, avant 1800, le verso des cartes — à l'exception des jeux de tarot — était blanc.
Les gens les utilisaient parfois pour transmettre des messages, mais les Américains innovèrent de ce côté-là.
Avec leurs légendaires côté mercantile, ils imprimaient des publicités pour promouvoir toutes sortes de produits, la carte devenait alors un support publicitaire !

La fabrication et l’origine des cartes c’est bien, mais les premières cartes à collectionner d’où viennent-elles ?

Et bien c’est aux Etat Unis que tout à commencer, notamment et aussi surprenant que cela puisse paraître, grâce aux baseballs.
La première collection de cartes comprenant entre autres des joueurs de baseball date de 1886-87 : il s'agit d'un set de 55 cartes consacrées aux grands champions sportifs de l’époque.

Les premières collections de cartes exclusivement consacrées au baseball sont publiées en 1888.
La marque de cigarettes « Old Juges » publie des cartes non numérotées, et aucune information sur le nombre de cartes constituant le set complet n'est d’ailleurs publiée par le fabriquant, malgré tout 172 cartes différentes ont été recensées. Elles présentent des photographies des joueurs et pas des dessins comme cela était le cas sur les cartes du set précédent.

Suivirent des sets de cartes divers et variés avec des collections dédiées, par exemple, au basketball au début des années 1930.
Après la seconde guerre mondial le premier set entièrement en couleurs est édité en 1950 par la société Bowman Gum qui produisait des cartes de basketball et de football américain.

A ne pas confondre avec Booba Gump de Forest gump hein !

Bref, en parallèle la société Topps également dans le même secteur d’activité, connaît un franc succès à partir de 1952 et rachète Bowman en 1955, devenant le seul grand distributeur de cartes jusqu'à la fin des années 1980. À cette période, le marché des cartes connaît un vif rebond et d'autres éditeurs entrent sur le marché, notamment Upper Deck qui depuis 1988 est l’un des leaders du marché.

Upper deck qui aujourd’hui produit et commercialise toujours des cartes à collectionner sportive comme celle de la NBA ou la NFL a également produits en Europe et aux États-Unis les cartes du célèbre manga Yu-Gi-Oh ! Jusqu’en 2009, et bien d'autres encore…

De manière beaucoup plus moderne certains jeux de cartes à collectionner, mais surtout à jouer, sont toujours apprécié depuis des décennies par les joueurs, à l’image du manga Yu-Gi-Oh ! mélangeant jeux de cartes et mythologie égyptienne.
Le créateur du manga Kazuki Takahashi qui est par ailleurs un grand passionné de jeu dira ouvertement s’être inspiré d’un autre célèbre jeu de cartes, le célèbre : Magic the Gathering !

Aujourd’hui les règles de jeu sont beaucoup plus complexes que le jeu d’origine inventé en Chine.
Cette fois les cartes peuvent être des sorts de feu, des consommables nécessaires à l’invocation de monstres ou encore à sacrifier afin de voir un légendaire dragon venir détruire le jeu de votre adversaire.

L’attrait pour les cartes ou la collectionnite ne date donc pas d’hier et à été remise au gout du jours par des jeux comme Magic, Yu-Gi-Oh ! et bien évidement Pokémon dont nous entendons parler à outrance depuis quelques temps.

Comme vous avez pu le voir les règles de ses jeux évoluent et se complexifie avec le temps, tandis que les collectionneurs recherchent tous la même chose : obtenir un set de cartes complet ! ce qui engendre bien évidemment une spéculation à outrance – surtout quand quelques Youtubeurs lance une mode –
Mais nous n’allons pas épiloguer sur le sujet ici !

Nous arrivons à la fin de cette émission et nous espérons que cet épisode vous a plus !

C’était un plaisir de pouvoir vous montrer le musée de l’Imprimerie et de la communication graphique de Lyon que nous remercions chaleureusement et que nous vous conseillons une fois de plus de visiter !

N’hésitez pas à vous abonner si vous apprécier les émissions et à nous dire en commentaire si vous aussi vous êtes collectionneurs de ses petits bouts de cartons !

Je vais être transparent avec vous, à la base je n’ai vraiment pas fait le rapprochement entre la ville de Lyon et l’histoire du jeu de cartes sur laquelle je travaillais.
Comme quoi, on a toujours des surprises au moment de réécrire l’histoire !

Sources :
-Wikipédia
-Musée de l'imprimerie et de la communication graphique de Lyon
-Musée Gadagne
-Musée des cartes à jouer